De part et d'autre ***

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mardi 6 octobre 2009

En Floride, l'éternel espoir du rebond

Un article intéressant du monde Diplomatique...avec quelques illustrations persos....

La crise vue des Etats-Unis.
En Floride, l'éternel espoir du rebond



Miami, Palm Beach : noms de cartes postales. Pourtant, les touristes s’y font plus rares. Et ils restent moins longtemps. Les retraités du Nord-Est et du Midwest rêvaient d’acquérir une résidence dans cette région réputée pour la générosité de son soleil. Ce n’est plus tout à fait le cas...


Par Olivier Cyran

C’est une maison comme il en existe des milliers à Lehigh Acres : un pavillon de carte postale avec son garage, sa pelouse à barbecues et son mât pour hisser les couleurs américaines. « A vendre », annonce le panneau à l’entrée. « Invendable », corrige Tom (1), un lycéen rieur de 17 ans. La pelouse est jonchée de détritus, et la porte du garage a été arrachée de ses gonds, remplacée par une palissade fixée à la va-vite. Quant au mât, il n’a plus vu claquer le drapeau depuis que la banque a jeté ses propriétaires à la rue, en 2007. Lampe torche à la main, Tom fait le tour de la maison et s’arrête devant une fenêtre barrée de deux planches formant une croix. « Venez, c’est par ici. » En sifflotant, il soulève l’une des planches et se glisse dans la cuisine.

Une forte odeur de moisissure accueille les visiteurs ; elle témoigne de l’inondation provoquée par l’arrachage de l’évier. « Mon oncle et sa femme ont tout cassé quand ils sont partis, explique notre guide. Tout le monde fait ça, c’est normal. C’est la seule manière de se venger un peu de ces salopards de banquiers. » Saisie dans le faisceau lumineux de sa lampe, une page de calendrier représentant un coucher de soleil sur une plage de Floride gît dans les décombres. Derrière la cuisine, un escalier mène à une cave exiguë où Tom nous dévoile sa petite entreprise : dix plants de cannabis au parfum prometteur, arrosés par un goutte-à-goutte et éclairés par des tubes fluorescents.
« C’est une époque formidable pour faire des affaires. Je n’avais jamais connu une période aussi excitante ! », jubilait le milliardaire Donald Trump, le 15 avril, sur Cable News Network (CNN). Que la crise offre des occasions à qui veut bien les saisir n’a pas non plus échappé à Tom, qui se revendique « jeune entrepreneur indépendant ». Son père, technicien en bâtiment, a perdu son travail depuis que Lehigh Acres, l’interminable banlieue de Fort Myers située sur la côte ouest de la Floride, s’est muée en zone sinistrée. Cette descente aux enfers des saisies immobilières a même eu les honneurs de la presse nationale. « Bienvenue dans le rêve américain, en marche arrière toute », a ironisé à son propos le New York Times (2).

Durant le boom spéculatif du début des années 2000, les maisons s’y arrachaient pourtant comme des petits pains. « Ce n’était pas un bidonville, mais une ville- champignon qui est passée de trente mille à quatre-vingt mille habitants en trois ans, se souvient M.Edward Weiner, un architecte membre de la chambre de commerce locale. Mais nous avons sous-estimé la cupidité des banques, qui ont voulu gagner trop d’argent, et celle des spéculateurs, qu’ils soient de Brooklyn, d’Allemagne ou du Venezuela, qui ont acheté des maisons sur plans sans se préoccuper des locataires qui vivraient dedans. Aujourd’hui, ils laissent le bâti pourrir sur pied ; 20 % des dix mille maisons construites à l’époque n’ont jamais été habitées. Les banques sont devenues plus prudentes, mais elles s’obstinent à déloger les propriétaires endettés. C’est absurde, car les saisies ont pour conséquence de dévaloriser toutes les maisons encore habitées du voisinage. Les banques mettent les gens à la rue pour récupérer ce qu’elles savent ne pas pouvoir revendre. »



Désormais, une maison qui partait pour 300 000 dollars en 2004 trouve difficilement acquéreur même à moins de 100 000 dollars. Avec optimisme, M.Weiner note cependant que le nombre de saisies opérées en mars (deux mille cent) a été légèrement inférieur à celui de février (deux mille trois cents). « La reprise est pour dans dix-huit mois, tout au plus », affirme-t-il.
En attendant, les emplois continuent de disparaître par milliers. Le taux de chômage a presque quadruplé en deux ans, passant de 3,5 % en mars 2007 à 12 % en mars 2009. La combinaison des pertes d’emplois et des foreclosures (saisies de biens immobiliers hypothéqués), alliée à l’urbanisme typique de la middle class américaine — une enfilade de pavillons plantés à bonne distance l’un de l’autre, sur des dizaines de kilomètres de bitume sans piétons, entrecoupés seulement çà et là par une église, un centre commercial ou un terrain de golf désaffecté —, a favorisé les vocations de... cultivateur. « Les maisons vides s’y prêtent, souligne Tom. Dans celle de mon oncle, en plus, ils n’ont pas coupé l’électricité. La banque est incapable de la revendre, alors pourquoi ne pas la rendre utile à quelque chose ? J’y passe de temps en temps pour vérifier que tout va bien. Si les flics débarquent, ils ne sauront pas que c’est moi. »


La reconversion des foreclosures en serres clandestines donne du fil à retordre aux autorités. En 2008, la police de Lehigh Acres a saisi plus de trois mille plants de cannabis pour une valeur avoisinant les 7 millions de dollars. Mais, de son propre aveu, il lui est impossible de fouiller chacune des quelque mille cinq cents maisons vacantes dispersées sur un territoire quatre fois plus grand que Manhattan. « Les gens sont de plus en plus pauvres, ce qui entraîne beaucoup de trafic de drogue et de délinquance juvénile, reconnaît le lieutenant de police Richard O. Dobson. A quoi s’ajoute que les maisons ont perdu 70 % de leur valeur. Des Latinos de Miami en profitent pour les racheter et y cultiver leur marijuana. Pas une semaine ne passe sans qu’on procède à des arrestations, et on a déjà muré plus d’une centaine de maisons. Mais on ne peut pas tout contrôler. » Quand on lui rapporte les déclarations du lieutenant Dobson, Tom hausse les épaules. « La police met tout sur le dos des Cubains. C’est vrai que, eux, quand ils arrivent, ils ne font pas les choses à moitié, mais je connais pas mal de gens du coin qui pratiquent le même business. Ce n’est pas sans danger, mais nous, on nous remarque moins que les Cubains. »

En guise de protection, une arme à feu

Impuissante à lutter contre la prolifération des plantations, la police a convié les habitants à lui prêter main-forte, dans le cadre d’un programme baptisé du nom bucolique de « Weed and Seed » (« Herbe et semences »). «  “Weed”, c’est pour les bad guys [les méchants], gronde le policier. “Seed”, par contre, renvoie à l’idée d’impliquer la communauté, d’abord en distribuant aux gens de la nourriture et des vêtements, ensuite en les invitant à nous appeler quand ils voient quelque chose de louche. » Tom fait la grimace, pas convaincu. « Ils espèrent régler le problème en distribuant du beurre de cacahouète et en encourageant les dénonciations, dit-il en appréciant du bout des doigts la floraison de ses plantes. Mais on ne peut pas empêcher des gens qui n’ont plus rien de vouloir s’en sortir. Mes parents vont peut-être réussir à garder leur maison, puisque ma mère travaille encore. Mais ils sont au bout du rouleau et savent qu’ils ne pourront pas me payer des études. Alors, pour préparer l’avenir, j’avais le choix entre l’herbe et l’armée. J’ai choisi l’herbe. »
Les deux fils d’une voisine ont fait un choix différent : l’un s’est engagé chez les marines ; l’autre, dans la Navy. Leurs photographies encadrées trônent sur le bureau de leur mère, Mme Pamela Kaye, directrice adjointe du Lehigh Community Services, les services sociaux de la ville. « Je suis fière de mes garçons, dit-elle. De toute façon, il fallait qu’ils partent. Depuis que nos voisins les plus proches ont été expulsés, on ne se sent plus en sécurité. Mon mari veut acheter un fusil, mais je n’aime pas les armes à feu. »

Mme Kaye coordonne le projet d’aide alimentaire intégré au programme « Weed and Seed » : packs de lait, confitures, pâtes, riz, pots de beurre de cacahouète — « un produit très nourrissant », dit-elle d’un air jovial. Entre octobre 2008 et avril 2009, son équipe a distribué ces conserves — « Jamais de produits frais, ça ne se garde pas » — à mille deux cent quarante-cinq familles. « Certaines n’ont même plus l’eau ni l’électricité, remarque-t-elle. Quant à ceux qui ont perdu leur maison, ils dorment dans leur voiture, se réfugient chez des proches, ou s’en vont on ne sait où, puisqu’il n’y a pas de foyer pour SDF [sans-domicile-fixe] à Lehigh Acres. On aide comme on peut, mais on n’a aucun budget, on ne travaille que grâce aux donations et au bénévolat. »
Il est vrai que la collecte des taxes d’habitation a chuté de 47 % en 2008, creusant un trou de 9 millions de dollars dans les finances de la ville. Pour aider leurs pauvres, les autorités préfèrent donc s’en remettre à la charité des notables et des églises.
Dans la petite salle d’attente du Lehigh Community Services, un quinquagénaire trapu au visage tanné par le soleil patiente en épluchant les prospectus. Jimmy a travaillé pendant vingt-sept ans comme plombier avant de se faire licencier, il y a une semaine. C’est la première fois qu’il sollicite une aide alimentaire. « Moi, ma maison, je l’ai construite de mes mains, personne ne va me la reprendre, dit-il. Mais je suis quand même endetté jusqu’au cou, à cause des crédits que j’ai dû prendre pour couvrir des dettes plus anciennes. La valeur de mon terrain avait triplé entre 2002 et 2004 ; aujourd’hui, il ne vaut plus rien. Trop de monde a voulu en croquer : le BTP [bâtiment et travaux publics], les agents immobiliers, les banques... La crise est venue comme un coup de marteau : du jour au lendemain, tout était fini. »
Et le programme de relance économique du président Barack Obama ? N’oblige- t-il pas les banques à renégocier leurs prêts aux ménages surendettés ? « Ça marche pour ceux qui ont des revenus, pas pour ceux qui n’ont rien », rétorque Jimmy. Mme Kaye acquiesce : « Les gens qui viennent ici, aucune banque n’a accepté de renégocier leurs crédits. Et après, on s’étonne que les familles virées de chez elles expriment leur colère en détruisant leur maison. C’est ce qu’ont fait nos voisins, et je ne les blâme pas. »

Une mère cubaine entrouvre la porte, visiblement gênée, elle aussi en quête de nourriture. Dehors, son mari et leurs deux enfants attendent dans la voiture, une affichette « A vendre » scotchée sur la lunette arrière. « Les malheureux, souffle Mme Kaye. Quand on perd sa maison, on peut toujours dormir dans sa voiture. Mais si on perd aussi sa voiture, on est fichu. Surtout ici, où les distances sont si grandes et les bus si rares. » Il suffira pourtant d’une visite chez Plattner, le vendeur de voitures d’occasion, sur Abrams Boulevard, pour constater qu’il ne s’agit pas là d’un cas isolé. « On a des centaines de véhicules sur les bras, il y a plus de gens pour en vendre que pour en acheter », se lamente un vendeur qui parle d’un « marché saturé ».

Le lycéen, le policier, l’architecte, l’ouvrier au chômage et la travailleuse sociale partagent néanmoins la conviction que la crise ne peut plus s’aggraver et que, demain, tout ira mieux. Jimmy en est persuadé : « La Floride est un Etat dynamique, l’économie va forcément repartir. De toute façon, je n’ai pas le choix : je ne peux pas compter sur ma retraite. » « Je suis optimiste, la construction va reprendre, assure aussi le lieutenant Dobson, qui certifie que « déjà les choses s’améliorent ». « D’ici quelques mois, je trouverai du boulot ailleurs et je ne ferai plus pousser de l’herbe que pour ma consommation personnelle », conclut Tom en pouffant.
Déconcertant, cet optimisme est-il pour autant infondé ? Assurément non, si l’on en juge par la profusion de sites Internet qui proposent à une clientèle française d’« acheter et investir en Floride ». Avec cinq cent quarante-neuf mille quatre cent quatorze saisies immobilières en 2008, qui la placent au deuxième rang des Etats américains les plus touchés par la crise, après la Californie, la Floride présente en effet « d’immenses possibilités pour les investisseurs » ainsi qu’une « opportunité de diversification de placements à des prix nettement inférieurs à ceux pratiqués en Europe », ainsi que l’annonce le site Monappartamiami.com. « Une maison en Floride avec piscine ? Un rêve enfin accessible avec 20 000 euros d’apport », jubile Capfloride.com, dont la page d’accueil affiche en bandeau ce conseil décomplexé  : « Profitez de la crise américaine. »

« Ils n’ont pas ce rapport
sentimental aux choses »

Madame Brigitte Bénichay a su anticiper l’invitation. Installée à Miami depuis vingt ans, cette diplômée en économie de Paris-Dauphine est la directrice comblée de Rich Homes of Florida, qu’elle présente comme « la première agence immobilière américaine dirigée par des francophones ». A ses yeux, la crise a d’abord l’immense mérite d’avoir éliminé certains de ses concurrents. « En 2004, raconte-t-elle, on vendait n’importe quoi à n’importe qui : les gens faisaient la queue à 5 heures du matin pour acheter un appartement. Les prix devenaient délirants, 6 000 dollars le mètre carré ! A l’époque, tous les Français de Miami voulaient devenir agents immobiliers. Il faut dire que c’est très facile d’ouvrir une agence, aux Etats-Unis : il suffit de passer un brevet qui se résume à un test QCM (3). Mais il y a eu des abus, des escroqueries. J’ai connu un collègue qui est parti en laissant une ardoise de 40 millions de dollars. La crise a permis de purger le système, de faire le tri entre les bons et les mauvais. »

Certes, elle gagne « un peu moins d’argent aujourd’hui qu’au moment du boom », comme elle l’admet à la terrasse d’un café de South Beach, le quartier tape-à-l’œil de Miami. Mais elle ne se plaint pas. « On s’en sort bien. Ce matin, j’ai vendu, pour 400 000 dollars, un appartement qui en valait 1,2 million il y a seulement deux ans. A l’époque, j’étais à deux clics par jour sur mon site Internet. Aujourd’hui, j’en suis à cinq cents ! » Sa clientèle, à 100 % française, ne se limite plus aux patrons de petites et moyennes entreprises et aux cadres supérieurs. La curée aux bonnes affaires s’est démocratisée : « Chaque jour, je reçois des mails de gens qui disposent d’un budget inférieur à 150 000 dollars, des retraités, des commerçants... Je n’ai jamais eu autant de clients pauvres !, lâche Mme Bénichay dans une explosion de rire. Ah oui, la Floride, ça fait toujours rêver. »
Tout comme ses collègues gestionnaires de fortunes (lire « “Un bon coup à jouer, comme au Maroc” »), la patronne de Rich Homes of Florida peut envisager l’avenir avec confiance : « On en est à un million sept cent mille saisies immobilières dans l’ensemble des Etats-Unis et on estime que ça va continuer jusqu’en 2012. » A cette perspective riante s’ajoutent des conditions fiscales ensoleillées, puisque ici « l’abus de biens sociaux est légal », de sorte que Mme Bénichay vit sur les revenus de sa société « sans payer d’impôts ». Ce n’est donc pas une grosse surprise si elle se sent « très à l’aise avec la mentalité américaine. Les gens sont plus philosophes que chez nous : ils n’ont pas ce rapport sentimental aux choses. Quand quelqu’un se fait saisir sa maison, chacun trouve normal de tirer profit de la situation. Comme on dit ici : “I pay my bill, that’s it !” [“Je paie ma note et c’est bon !”] »


Depuis quelques mois, une mentalité moins arrangeante se manifeste pourtant à Miami. Dans le quartier noir de Liberty City, l’un des plus pauvres de la ville — l’un des moins intéressants aux yeux de Mme Bénichay —, un collectif baptisé Take Back the Land (« Reprendre possession de la terre ») récupère des maisons saisies par les banques pour y loger des familles sans abri. A ce jour, dix habitations seulement ont fait l’objet d’une réquisition durable. Il est vrai que les obstacles sont nombreux. « D’abord, il faut qu’on trouve des maisons pas trop abîmées, indique M. Max Rameau, l’un des fondateurs du collectif. Or la plupart ont été saccagées par leurs occupants au moment de leur expulsion. Notre équipe peut effectuer des petits travaux, rebrancher l’électricité ou installer de l’électroménager de récupération, mais on n’a pas les moyens de faire du gros œuvre. Ensuite, il faut compter avec la police de Miami, l’une des plus détestables des Etats-Unis. Notre chance, c’est que la crise est si grave que les policiers n’ont pas nécessairement le temps ni l’envie d’envenimer les choses. Ils savent que le quartier est derrière nous : provoquer une émeute n’est pas leur priorité du jour. »

Né de parents haïtiens, lecteur de Frantz Fanon et des Black Panthers, M. Rameau se réjouirait presque de l’irruption de la crise, qui, dans son quartier du moins, a mis un frein provisoire à la voracité immobilière. Car, en dépit de ses vendeurs de crack et de ses trottoirs défoncés, Liberty City n’a pas été épargné par le boom du début des années 2000. A preuve, ce terrain vague clôturé de tôles à l’angle de la 17e Avenue et de la 62e Rue. « En 2006, la mairie a voulu offrir ce lopin à des promoteurs pour qu’ils y construisent des appartements de standing. Ce projet s’insérait dans le processus de gentrification (4) qui a grignoté Liberty City depuis les années 1990. La plupart des quartiers noirs, aux Etats-Unis, ont subi la même évolution : les promoteurs débarquent, achètent à bas prix, vident les lieux puis les revendent très cher. Evidemment, ils ne s’attaquent pas au cœur du quartier mais à ses bordures. Petit à petit, le quartier se rapetisse, mangé sur ses marges par une nouvelle population, généralement blanche ou noire embourgeoisée. C’est pour lutter contre cette dépossession que nous avons créé Take Back the Land. »
La suite appartient tout autant à l’histoire du quartier qu’à l’histoire des luttes. Le 23 octobre 2006, les militants de Take Back the Land s’emparent du terrain promis aux promoteurs pour y construire des cabanes en bois destinées aux mal-logés du voisinage. « On a d’abord organisé des réunions publiques pour convaincre les habitants, qui se montraient sceptiques, raconte M. Rameau. Puis on a créé un groupe plus restreint chargé de faire du porte-à-porte. Quand on est passés à l’action, les gens ont été si épatés de voir qu’on ne bluffait pas qu’ils nous ont massivement soutenus. C’est ce qui explique que la mairie ne nous a pas délogés. »
S’inspirant du Mouvement des sans-terre brésilien, le collectif met en place un lieu de vie autogéré où seuls l’alcool, la drogue et le harcèlement sexuel sont prohibés. Le « village », appelé Umoja (« unité » en swahili), va prospérer six mois, jusqu’à ce qu’un incendie le détruise une nuit d’avril 2007. « Dès le lendemain, les bulldozers avaient rasé tout ce qui tenait encore debout. Il n’y a jamais eu d’enquête (5). »

A la veille
de changements sociaux
majeurs ?


Depuis, la crise a pris le relais des militants pour embourber l’offensive des promoteurs. « Ils ont d’autres problèmes, à présent, ce n’est pas tout de suite qu’on va les revoir à Liberty City », note M. Rameau avec un sourire narquois, tout en s’étonnant que les foreclosures n’aient pas déclenché des mouvements de protestation plus massifs. La démarche qui consiste à reprendre aux banques ce qu’elles ont saisi épouvante nombre d’Américains, et pas seulement les agents immobiliers, comme en témoignent les commentaires indignés déversés sur le blog de M. Rameau. « Prendre des maisons qui ne vous appartiennent pas, vous ne manquez pas de culot, s’étrangle un internaute. Et pourquoi pas aller dans un hôtel et exiger qu’on vous offre une chambre gratuitement ? »
« On s’attaque au tabou de la propriété, ce qui n’est pas une mince affaire, dans ce pays, soupire le porte-parole de Take Back the Land. C’est assez curieux : la plupart des gens trouvent normal que vous saccagiez votre maison quand la banque vous éjecte, mais ils ont beaucoup plus de mal à accepter que vous la remettiez en état pour héberger des familles. »

Lui aussi pourtant se déclare optimiste, même si c’est pour des raisons autres que celles de M. Trump : « Nos actions commencent à faire des émules, à Portland, à Denver, en Californie... On est très minoritaires, pour l’instant, mais les gens n’ont pas d’autre choix que de se prendre en main. C’est une question de survie. Ça va peut-être demander dix ans, mais je suis persuadé que nous sommes à la veille de changements sociaux majeurs. »

Olivier Cyran.

 

Journaliste.
(1) Son prénom a été changé.
(2) « In Florida, despair and foreclosures », The New York Times, 8 février 2009.
(3) Questionnaire à choix multiple.
(4) Embourgeoisement d’un quartier pauvre par injection de ménages des classes moyennes dans un bâti neuf ou réhabilité.
(5) M. Rameau détaille cette expérience dans un ouvrage fort utile à la compréhension des mécanismes immobiliers dans les quartiers populaires  : Take Back the Land : Land, Gentrification and the Umoja Village Shantytown, Nia Press, Miami, 2008.

lundi 5 octobre 2009

Small things


Un dernier kollage pour la route...

Sinon pour ne pas entendre les Randomixtapes qui se mettent en route pendant la visualisation du blog, il suffit de les mettre en pause (en cliquant sur le triangle au milieu de la K7)...pour ceux qui ne savaient pas

des pistes

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